Le choix des Justes de Camus tient à de forts souvenirs scolaires, mais surtout aux interpellations de l’actualité nationale et internationale :
L’année 2013 devait également marquer le centenaire de la naissance de Camus. Ce projet pouvait ainsi s’inscrire dans l’espace des échanges appelés par cette commémoration.
Sujet Moscou, 2 février 1905 : un groupe de révolutionnaires russes prépare un attentat contre le grand-duc Serge, oncle du tsar Nicolas II, pour précipiter la chute de l’autocratie et bâtir un régime de liberté. Choisi pour jeter la bombe, Kaliayev y renonce au dernier moment : le grand-duc est accompagné de sa femme et de deux enfants, ses neveux. La désicion de ne pas lancer la bombe provoque une violente dispute au sein du groupe des révolutionnaires : est-il permis de verser un sang innocent, même dans un but honorable ? Le drame se double d’un second : au moment du passage à l’acte, toute vélléité de s'héroïsé montre à celui qui doit commettre l'attentat (et en mourir), des obstacles qu’il méconnaissait (peurs, responsabilité envers les autres, renonciation à son propre avenir). Comment surmonter ces obstacles, si l’on veut vivre et agir ?
Faisant écho à L’Homme révolté, Camus s’appuie dans Les Justes sur une donnée historique pour interroger les conséquences du recours à la violence révolutionnaire dans le cadre de la guerre froide qui suit la 2nde Guerre Mondiale, surtout quand ce mode d’action entend se fonder sur des valeurs morales.
Comme le théâtre de Sartre, celui de Camus a été épinglé comme un "théâtre philosophique". Le jugement est exact en ce que les sujets traités sous-tendent une thèse précise ; il est faux dans la mesure où les personnages ne sont pas des "idées" : quand on lit le texte de près, ce sont des êtres de chair et de sang, dotés d’une histoire et d’un caractère propres.
On doit par ailleurs rapprocher Les Justes du livre que Camus avait sous les yeux lorsqu’il écrivit sa pièce, Souvenirs d’un terroriste, de Boris Savinkov (chef historique du groupe révolutionnaire et modèle du personnage d’Annenkov) : s’y montre à nu le climat d’angoisse et de violence dans lequel le groupe a vécu, et la terrible violence qu’il pouvait perpétrer : le souffle de la bombe qui tua le Grand Duc fit voler en éclats les vitres d’alentour ; et le lendemain, on retrouva sur le toit d’un immeuble voisin un des gants du Grand Duc qui contenait encore un des doigts. De ce fait, représenter Les Justes induisait de privilégier le climat de suspens qui précède l’attentat, la violence de la situation (même si, à l’instar du théâtre classique, Camus la maintient hors scène), mais aussi l’intériorité comprimée des membres du groupe, leurs confrontations d’écorchés vifs, les élans et les silences de leurs amours à fleur de peau. De même, quand on connaît mieux sa biographie, veiller à représenter la Grande Duchesse dans sa dignité hiératique et sa lumineuse grandeur : elle n’a rien de la mystique écervelée qu’on voit d’ordinaire en elle. Sans doute a-t-elle a grandi sous le sceau d’un christianisme institutionnel, mais son attitude envers Kaliayev le touche profondément. C’est pour restituer toutes ces dimensions humaines que Camus a choisi de donner aux Justes une dramaturgie et un langage épurés. Nul besoin de décor "historique" sur le plateau. Dans ce domaine aussi, l’épure doit prévaloir.
Accompagnement pédagogique Vu son rapport étroit avec l’actualité, ce projet nécessitait un nouvel accompagnement pédagogique et culturel. Un partenariat similaire aux précédents a ciblé plusieurs axes :
Représentations : Théâtre du PréO, Oberhausbergen - 2-9 mars 2013
Reprises :
2013 : | Strasbourg, "Bibliothèques Idéales", salle de l’Aubette. [19 septembre] Programme |
Festival de Montauban, théâtre Olympe de Gouges. [22-23 novembre] Programme Restitution |
2016 : | Rueil-Malmaison, Centre Culturel de l’Athénée. [12-13 février] |
Oberhausbergen, Théâtre du PréO. [22-23 février] |
Certaines de ces vidéos sont extraites de captations improvisées de qualité limitée. Elles ont pourtant été conservées en témoignage du spectacle et du jeu des interprètes.